ChatGPT, un an après : ce que les entreprises ont d’ores et déjà appris

Par Kurt Muehmel, Everyday AI Strategic Advisor de Dataiku

Malgré les avancées, des points de blocage empêchent d’embrasser tout le potentiel de l’IA générative dans les entreprises. Celles-ci doivent donc se placer dans une posture continue de découverte, de planification et d’exécution pour profiter d’une opportunité historique.

Cela fait un an que ChatGPT a été lancé, ouvrant un immense champ d’intérêt dans les entreprises et une prise de conscience du potentiel de l’intelligence artificielle générative. Bien que l’IA générative et les grands modèles de langage (LLMs) étaient connus avant le lancement de ChatGPT, la facilité d’utilisation de ce chatbot a propulsé cette technologie dans les mains des dirigeants d’entreprise, qui ont inscrit la technologie sous-jacente sur la liste de leurs priorités.

Au cours de ces douze mois, les nouveaux modèles d’IA générative ont démontré qu’ils pouvaient surpasser les technologies classiques de traitement du langage naturel dans des tâches assez courantes comme la traduction ou l’écriture de résumés. Et bien sûr, comme leur nom l’indique, ils ont montré qu’ils pouvaient générer des textes qui se lisent comme s’ils avaient été rédigés par des humains. Néanmoins, il est vite apparu que compte tenu de leur taille et de leur mode de fonctionnement, l’utilisation pertinente de ces modèles exigeait la prise en compte d’un certain nombre de considérations.

Bien qu’une année ait passé, nous en sommes encore largement au stade de la découverte, s’agissant en particulier d’identifier les façons d’utiliser l’IA générative à “grande” échelle dans les entreprises. La plupart d’entre elles en voient bien le potentiel sur des centaines ou des milliers d’applications dans tous les domaines, mais peu d’entre elles encore ont commencé à démontrer une réelle capacité de passer à l’échelle suivante.

Les goulots d’étranglement des LLMs
Il existe plusieurs points de blocage qui empêchent d’embrasser tout le potentiel de l’IA générative dans les entreprises. Celui de la sécurité et des autorisations est le premier d’entre eux. Les entreprises doivent mettre en place un mécanisme pour s’assurer que les bonnes données sont utilisées avec les bons modèles et par les bonnes personnes. Le système d’autorisations doit donc être sérieusement renforcé pour s’assurer d’une utilisation responsable et de résultats optimisés.

Un autre point de blocage est le coût. Lorsque ChatGPT a été lancé, cela a donné lieu à beaucoup de débats sur le coût d’entrainement des modèles, et certains confondaient même les coûts d’entrainement et d’utilisation. Bien que le coût par requête soit peu élevé, il peut facilement s’envoler, à mesure que les cas d’usage se multiplient dans l’entreprise. Cela renforce encore la nécessité de se servir du bon modèle pour une utilisation spécifique et d’une stratégie d’optimisation des coûts d’intégration et de maintenance des LLMs.

Troisième point de blocage : la sûreté. Les entreprises doivent avoir la garantie qu’elles ne transmettent pas de données sensibles à un tiers extérieur non approuvé. La sûreté commande également d’auditer ce qui a été demandé à ces modèles et la façon dont ils ont répondu. Dans toute organisation, la gestion d’un process de données nécessite de savoir ce qui a été fait et par qui, afin de pouvoir tracer et résoudre les problèmes si jamais ils surviennent.

Ces points de blocage ont incontestablement contrarié une adoption pleine et entière des LLMs par les entreprises. Comment se présente l’avenir ?

Découvrir, tester, planifier, exécuter…
Dans des transitions technologiques de cette ampleur, cela peut prendre de 12 à 36 mois avant que les entreprises n’adoptent ces technologies d’une façon qui leur permette à la fois d’en toucher les bénéfices et d’en atténuer les risques. Les grandes organisations ont besoin de temps pour changer de direction, mais le rythme du changement a tendance à s’accélérer rapidement avec les LLMs. Alors que les entreprises commencent à peine à formaliser l’utilisation de LLMs fondés sur les textes, voici qu’apparaissent des modèles multimodaux pouvant traiter des images et des vidéos, qui portent de nouveaux défis et ouvrent de nouvelles opportunités. Les organisations doivent donc se placer dans une posture continue de découverte, de test, de planification et d’exécution.

En outre, l’Europe vient de rédiger son AI Act, les États-Unis ont produit un nouvel Executive Order sur l’IA, ce qui va obliger les entreprises à renforcer leurs process de compliance. Nous savons que les régulateurs avancent moins vite que la technologie, ce qui signifie que les entreprises doivent anticiper les futures régulations. Un conseil ? La bonne gouvernance est la meilleure façon d’éviter les embrouilles de dernière minute.

Des résultats déjà démontrés
Parfois émerge la perception que les LLMs sont trop complexes. Néanmoins l’usage de cette technologie est beaucoup plus accessible que celle des systèmes de machine learning de la dernière décennie. Même les organisations qui ne disposent pas des jeux de données les plus sophistiqués ou des équipes les plus expertes peuvent utiliser l’IA générative pour faire de grandes choses. C’est sans conteste une belle opportunité pour la plupart des entreprises, quel que soit leur niveau de maturité en intelligence artificielle.

Mais l’essentiel est que nous avons déjà été en mesure d’observer la façon dont les LLMs pouvaient aider les organisations. Nous savons que dans la vraie vie, ils permettent des économies de coûts significatives et que les qualités uniques des humains – la créativité, l’imagination, etc. – trouvent à s’employer de la meilleure façon.

Publiée dans Les Echos le 21 décembre 2023

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